Nathaniel Hawthorne est un auteur américain (Salem 1804-Plymouth 1864) de nouvelles et de quelques romans. A l’âge de 20 ans il a modifié son patronyme qui était Hathorne en ajoutent un w, car il a voulu se démarquer des ses ancêtres puritains qui jugèrent en son temps les sorcières de Salem. Hawthorne fait partie de la « génération de la renaissance américaine » avec des auteurs comme E. Allan Poe, Melville, Emerson, etc. C’est un auteur canonique aux USA où il fait partie des classiques étudiés au lycée et c’est aussi un auteur qui a influencé beaucoup d’écrivains américains actuels comme Paul Auster, Stephen King, Lovecraft et d’autres.
En France il est peu connu en dehors de son roman phare La Lettre Écarlate et pourtant, il fut traduit par Baudelaire et Mallarmé.
C’est un écrivain nord-américain que je voulais lire depuis que l’écrivaine espagnole Rosa Montero l’ait cité et loué parmi ses lectures de la pandémie (Montero est une grande lectrice). Je ne l’avais jamais lu et je suis ébaubie par cette découverte.
Hawthorne emménagea au Presbytère de Concord (Massachussets) où il écrira la plupart des nouvelles figurant dans ce livre et y restera 3 ans.
L’énorme succès de son roman La Lettre Ecarlate (1850) lui permit de vivre de sa plume.
Il se liera d’amitié avec Herman Melville en 1850, lequel à cette époque travaille sur son livre Moby Dick, qu’il va lui dédier. Melville dira que les nouvelles de Hawthorne révèlent son côté sombre, tout en louant la qualité de l’écriture.
Hawthorne nous a laissé surtout des nouvelles, une centaine, qu’il appelait ses contes et qui reflètent la Nouvelle-Angleterre d’alors. Ces nouvelles sont des allégories morales sur un fond de culture très vaste; il a écrit sur le puritanisme qu’il critique pour son hypocrisie et son rigorisme intransigeant, tout en se déclarant non puritain.
Les mousses d’un vieux presbytère comporte 26 contes (2 chapitres et 13 contes par chapitre); ce livre a été l’objet d’une nouvelle traduction intégrale avec 3 traducteurs différents. Coup de chapeau aux traducteurs, car le texte n’est pas facile. La première de couverture est très jolie, elle évoque un livre ancien avec ses dorures.
L’écriture de Nathaniel Hawthorne est éblouissante, fine, riche en allégories, et ce qui m’a épaté le plus, c’est la modernité dans le choix de ses sujets et l’analyse psychologique fine qu’il en fait, tenant compte que tous les contes datent d’avant 1850 ! L’humour, assez présent, est aussi particulier, entre critique et ironique. C’est une lecture assez ardue de par son excès de richesse lexicale, culturelle, philosophique et religieuse avec cette tendance si anglo saxonne d’invoquer la Bible ou la religion chaque fois que l’occasion se présente. Je dirais que par rapport à tout ceci, c’est tout de même un récit très amphigourique, presque baroque dans sa complexité.
Le livre commence par une description rousseauiste du presbytère en question, un presbytère construit en 1765 par le grand-père d’Emerson et encore visible aujourd’hui. Un lieu retiré du monde, près de une nature généreuse, un lieu édénique propice à la concentration et à l’écriture. Un milieu historique aussi car c’est à Concord qu’a eu lieu une bataille importante dans l’histoire des USA, la bataille de Concord en 1775, prémices de la guerre d’Indépendance américaine. Hawthorne y séjourna 3 ans.
Les contes sont d’un genre très varié et il serait lourd de les citer tous. Ils sont tous intéressants et révèlent l’immense imagination de l’auteur et sa culture générale.
J’ai particulièrement apprécié La marque de naissance, un récit cruel où un « scientifique » de l’époque veut faire disparaitre une marque de naissance sur la joue de sa ravissante épouse. Il ira jusqu’au bout de son vouloir. Un autre conte, La fille de Rappaccini est sur le même thème, un « scientifique » de la première moitié du XIXè veut arriver à ses fins avec les moyens de bord; c’est étonnant, inquiétant et malsain; il m’a rappelé certains récits de Poe.
Dans certains récits l’écrivain se met en scène lui même, ceci est aussi une particularité rare pour l’époque . Par exemple dans M. du Miroir on a l’impression que l’auteur se regarde dans une glace et que c’est lui même qui est au coeur de cette analyse de sa personnalité. La note psychologique profonde est un autre apanage de cet auteur parmi bien d’autres.
Le Hall de l’imagination est un drôle de conte où, au cors d’un rêve, l’auteur fait un voyage vers le ciel où il verra beaucoup de personnages affublés de toutes les caractéristiques (bonnes et mauvaises) du genre humain. C’est très satirique et plein de sel.
Plumette : une légende avec morale qui est très drôle: une sorcière imagine un pantin à partir de choses hétéroclites et en connivence avec le diable, ils le transforment en un bel homme qui partira à la conquête d’une jolie fille. Or c’est grâce au diable qu’il est beau et quand il se voit dans une glace, il comprend qu’il est toujours un affreux pantin.
Et ainsi continuent ces contes, tantôt extravagants, drôles, gothiques, philosophiques, historiques, très meta-littéraires (tous les auteurs américains et certains européens sont cités), psychologiques, etc.
Oui, un grand de la littérature américaine qui mérite largement une lecture, même si celle-ci demande un effort.
LES MOUSSES…, Les Belles Lettres 2023, ISBN 978-2-251-45473-3