Jours sans faim de Delphine de Vigan

Delphine de Vigan est une romancière et réalisatrice française (Boulogne-Billancourt 1966), auteure de quelques onze romans à succès, certains d’entre eux couronnés par plusieurs prix littéraires.

Le premier livre que j’ai lu d’elle est Rien ne s’oppose à la nuit (2011) que j’ai beaucoup aimé. Un livre qui a récolté 4 prix bien mérités car l’écrivaine a trouvé une prose si adéquate pour nous décrire la bipolarité de sa mère et toutes les souffrances qui en ont découlé au sein de la famille et d’elle même.

Jours sans faim (2001) est le premier roman de Delphine de Vigan, publié sous le pseudonyme de Lou Delvig, un roman autobiographique qui raconte sa descente aux enfers, à l’âge de 19 ans, avec une anorexie qui l’a mené aux portes de la mort et qui a nécessité une hospitalisation de 3 mois. Ce texte a été écrit 15 ans après et de toute évidence comporte une liaison forte avec Rien ne s’oppose à la nuit; la teneur du texte serait inspirée du journal intime de Delphine de Vigan, journal tenu entre 12 et 29 ans.

Ce récit a été adapté par Violaine Brébion pour le Théâtre 3 Soleils et la pièce jouée en Avignon en juillet 2022.

Jours sans faim est narré à la troisième personne, dans un style assez télégraphique et percutant, ce qui donne un peu de distanciation par rapport aux faits, des faits racontés 15 ans après, témoins d’une renaissance, d’un retour à la vie.

Car la narratrice, Laure, a 19 ans et pèse 35 Kilos pour 1m75. Elle est au bord de la mort et accepte une hospitalisation pour essayer de s’en sortir.

Et le livre c’est cela, Laure narre son séjour à l’hôpital, sa lutte permanente contre les calories qu’on lui inflige, l’acceptation d’une nouvelle image corporelle au fil des semaines, le chantage permanent de la part de l’équipe soignante , l’entourage à l’hôpital avec cet échantillonnage d’humains en souffrance. Là où ce texte aurait pu baigner dans le pathos et le mélo, intervient la magie de la plume de l’écrivaine, faite de délicatesse, grâce, finesse et des touches d’un humour né de l’observation, et en même temps abordant ce sujet si grave, sans aucun apitoiement.

Laure s’en sortira, non sans peine, et reviendra à la vie (qui est loin d’être un long fleuve tranquille…), aidée par une équipe médicale rompue à cette pratique, solide, efficace. Le transfert que Laure a fait sur le gentil (et compétent) Dr Brunel l’aura aidé aussi.

Dans ce livre bref (125 pages) on n’approfondit pas les causes de ce désordre du comportement alimentaire, mais je pense que c’était le désir de l’auteure: rester dans le domaine de l’intime en sachant que chaque cas est différent, même si le symptôme est toujours l’anorexie, un symptôme qui recherche l’ivresse de la famine et la victoire sur les désirs.

Un très beau témoignage. Il devrait faire partie des lectures proposées aux lycéens afin de les éclairer sur un problème qui touche environ 1,5% de la population féminine en France.

Autres livres commentés : Les heures souterraines , Les loyautés , Les gratitudes , Les enfants sont rois . No et moi . Les jolis garçons .

Affiche de la pièce de Violaine Brébion

JOURS SANS FAIM, J’ai lu 2009 (DdV 2001), ISBN 978-2-290-01338-0

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