La salle de bal d’Anna Hope

Anna Hope est une actrice et écrivaine britannique (Manchester 1974); elle possède une maitrise en création littéraire.

La salle de bal (The Ballroom 2016) est le deuxième roman de l’auteure, encore un livre très fort pour décrire l’asile d’aliénés fictif de Sharston, voulant évoquer l’asile réel de Menston, où l’arrière-arrière grand-père d’Anna Hope avait été interné. Le livre a reçu le Prix des Lectrices d’Elle 2018.

Le fond du roman se base sur l’eugénisme, théorie scientifique qui prétendait améliorer la race humaine via la sélection des meilleurs spécimens ou l’élimination des spécimens les plus faibles. Des scientifiques et des personnalités de premier plan ont adhéré à cette théorie en Angleterre au XIXè siècle, comme Leonard Darwin (neveu de Charles), Francis Galton, Ronald Fisher, Arthur Balfour, Winston Churchill…

(Quelle inconscience, quel orgueil démesuré et quelle absurdité de vouloir prétendre une homogénéité humaine alors que l’essence même de celle-ci est une mosaïque de gènes combinés à l’infini…)

C’est un roman polyphonique avec 4 personnages principaux. Ella, 26 ans a été internée après une crise de violence dans la filature où elle travaillait en menant une vie d’esclave. John a été interné après un drame familial. Charles, le médecin (raté) de l’asile, personnage amer, le plus fou de tous, pervers dans ses connaissances médicales, mais mélomane passionné est un ambitieux au point de devenir un assassin amoral, Il essaiera de se rendre célèbre en contactant par lettre Winston Churchill sur un projet d’eugénisme à pratiquer parmi les patients de l’asile. Et Clem, la seule amie d’Ella, issue d’un milieu social supérieur mais internée car elle a refusé le mariage proposé par son père; Clem est persuadée qu’elle quittera l’asile, elle lit beaucoup car elle souhaite suivre des études universitaires.

Le docteur, dans sa mégalomanie intéressée, va créer un orchestre au sein de l’asile, orchestre qu’il va diriger afin d’organiser, chaque vendredi, un bal pour certains des patients « sélectionnés » selon un critère ambigu qui favorise les plus « obéissants ».

Charles pense qu’en apportant de la musique à ces pauvres hères, il va les améliorer. Mais en fait, il souhaite avant tout promouvoir son profil de thérapeute de génie et en tirer profit.

C’est dans ce cadre sinistre qui naitra l’amour entre Ella et John.

Avec un sujet scabreux, mais bien traité Anna Hope nous donnera des moments d’envolées lyriques d’une beauté crépusculaire au milieu d’une nature farouche mais belle à couper le souffle.

Comment ne pas mentionner un autre livre fort sur la condition des femmes en France au XIXè siècle, celui de Victoria Mas Le bal des folles (2019).

Autre livre commenté : Le chagrin des vivants . Le Rocher blanc .

LA SALLE DE BAL, Gallimard 2017 (AH 2016), ISBN 978-2-07-268872-0

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