Une machine comme moi d’Ian McEwan

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Ian McEwan est un romancier et scénariste anglais (Aldershot 1948) qui a publié plus de 10 romans et cumulé plusieurs prix. C’est un auteur best seller ayant vendu plus de 15 millions de livres à travers le monde…

Une machine comme moi (Machines like me and People like you, 2019) dont le titre a été ramené au singulier en français est une lecture qui m’a semblé pertinente, voire intelligente, faisant allusion à l’interphase qui existe entre l’humain et son lot d’imperfections éventuellement perfectibles, et une machine parfaite conçue par l’humain  mais dont le raisonnement est imprévisible.

Ce bon roman est plus proche de l’uchronie que de la dystopie, mais rentre dans les deux catégories pour moi. D’autres ont qualifié ce roman de typiquement postmoderne.

Charlie Friend a 32 ans et vit à Londres dans un appartement miteux, il a poursuivi des études d’anthropologie non achevées (est-ce pour cela qu’il achète un robot?); il vivote en boursicotant sur Internet. Il va hériter d’une grosse somme  d’argent et il investit cet argent dans l’achat d’un prototype de robot humanoïde presque « parfait » qu’il amène chez lui. Ce robot fait partie d’une série limitée de spécimens, mâles et femelles, qui se prénomment tous Eve ou Adam, selon leur sexe, ils ont une durée de vie autour de 20 ans. Il aurait préféré une Eve mais se contente d’Adam. qu’il se doit de programmer pour lui donner une « personnalité ». Ces machines savent faire beaucoup de choses, ont une mémoire illimitée, peuvent « penser » non-stop, mais n’ont aucun sens ludique, ne savent pas jouer ni avoir de l’humour…

Mais fichtre ! Comment faire fonctionner une machine parfaite dans un monde si imparfait (CQFD), car ces robots seront si accablés que…à découvrir (pas de spoiler ici, c’est un point fort du roman).

Au dessus de Charlie vit une jeune femme, Miranda, de dix ans sa cadette dont il se sent  attiré, bien que la jeune femme soit quelque peu fuyante. Et Charlie va déléguer à Miranda une partie de la programmation du robot.

Adam se met « à vivre » au milieu de ce couple et à partager beaucoup de choses, trop de choses, car il capte bien les affaires courantes et travaille à sa façon logique sans affect.

 Charlie et Miranda vont programmer le robot en même temps qu’ils deviennent partenaires sexuels…Et la cohabitation avec Adam va poser quelques problèmes pratiques, parfois difficiles, parfois inédits. Par moments le roman prend des allures de thriller : la cohabitation de ces trois personnages fait que Adam va tomber amoureux de Miranda !

Miranda a un lourd passif, ce qui corse le récit et rajoute une histoire dans l’histoire à la façon des boîtes chinoises. Le tout baignant dans les affaires politiques britanniques des années 80 avec la Dame de Fer aux commandes, la Guerre des Malouines, la crise sociétaire. L’inspiration romanesque d’Ian Mc Ewan va redonner vie au génial Alan Turing, père de l’Informatique, pour le faire participer à cette aventure avec un humanoïde.

Un livre très réussi en somme avec plusieurs histoires dans le même récit, beaucoup d’humour très british, et des questions à se poser sur le sujet de l’interphase Homme-Machine. Un super bouquin sur l’IA.

Je le rapproche d’un autre livre sur l’IA qui m’a frigorifiée en même temps que fascinée: il s’agit de Transparence de Marc Dugain que je qualifierai de vrai dystopie par son fond profondément sombre.

Dans une interview récénte autour de ce livre, le journaliste littéraire Jean-Claude Raspiengeas citait le sociologue Jacques Ellul qui, en 1954, avait écrit « la technologie: l’enjeu du siècle, et quand l’Homme invente une technique, il croit toujours en être le maître, et il finit toujours par cavaler derrière » (si cela pouvait être aussi anodin que cela, hélas !)

Autres livres commentés : Samedi, Sur la plage de Chesil, Un bonheur de rencontre, Amsterdam. Solaire  

UNE MACHINE COMME MOI, Gallimard 2019,  978-2-07-284997-8

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